La filière TRI est-elle fiable
« Cette filière manque de contrôles »
SEBASTIEN LAPEYRE, directeur du Centre national d'information indépendante sur les déchets (Cniid)
Directeur du Cniid, une association de protection de l'environnement, Sébastien Lapeyre milite pour la réduction des emballages. Car, selon lui, le succès de la collecte sélective du particulier reste trop aléatoire. Tous les déchets récupérés dans nos poubelles de collecte sélective sont-ils effectivement recyclés ? Sébastien Lapeyre. Non. A Paris, on estime que 25 à 30 % des déchets recyclables sont mal triés au départ. Le contenu des poubelles est du coup refusé au centre de tri et incinéré. Quand les éboueurs s'aperçoivent qu'un sac plastique fermé rempli de déchets a été jeté dans une poubelle destinée au recyclage, c'est tout le contenu de la poubelle qui est refusé ! Au final, ce sont des bennes entières qui finissent en fumée. D'où l'importance de bien trier ses déchets. Pourquoi les Français font-ils autant d'erreurs ? C'est en partie de la faute des villes qui n'ont pas harmonisé leur politique. D'une commune à une autre, les consignes de tri sont différentes, les bacs ne sont pas de la même couleur et c'est du coup très compliqué de s'y retrouver. Il y a quelques années, Paris avait lancé un système de collecte des sacs en plastique que les gens devaient déposer dans leurs bacs de recyclage. L'opération s'est arrêtée, mais les centres de tri sont encore inondés de sacs en plastique. Mais quand on rapporte son vieux téléphone au magasin, a-t-on l'assurance qu'il sera recyclé ? Apriori, oui. La nouvelle filière mise en place en 2006 devrait permettre d'améliorer la collecte et le traitement de ces déchets, mais il reste des incertitudes sur leur devenir. Des quantités très importantes de composants électriques et électroniques sont en effet exportées en Asie, sans que l'on sache vraiment comment ils sont retraités. Sachant que les industriels qui fabriquent tous ces produits financent aussi la filière de recyclage, ils sont juge et partie. Du coup, la préoccupation environnementale peut passer au second plan. Avez-vous constaté d'autres abus ? L'affaire de Marseille montre bien que le marché des déchets est très lucratif, au point que certains opérateurs sont prêts à répondre à des appels d'offres sans même avoir prévu les moyens de traiter correctement les déchets. L'an dernier, on a appris qu'Eco-Emballages, l'organisme chargé d'organiser la collecte des emballages, avait placé plusieurs dizaines de millions d'euros dans des paradis fiscaux alors que cet argent public est destiné aux collectivités pour les aider au recyclage. C'est une dérive inquiétante et on est en droit de se demander où va l'argent du contribuable. Cette filière manque cruellement de contrôles. L'avantage de ces révélations est qu'elles vont contribuer à assainir et rendre plus transparente la filière. Car il ne faudrait pas que ces affaires remettent en cause le geste de tri du citoyen.
Article paru dans le journal Le Parisien fin 2009
Pour info, l'agrément gouvernemental d' ECOEMBALLAGE a été renouvellé fin 2010 à la grande déception des organisations intervenant sur le domaine des déchets!!
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