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ADEME "rigolez pas c'est avec notre pognon ! (Coluche)"

Vive l’Ademe ! Vive la France ! Vive l’arnaque !

Comme je n’ai pas de temps en ce moment, vous me permettrez de recycler ci-dessous un article de moi paru dans l’hebdomadaire Charlie-Hebdo. Vous y verrez comme se porte bien l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (Ademe). J’y ajoute pour le même prix une information très, mais réellement très importante. Xavier Beulin vient d’être élu président du syndicat de l’agriculture industrielle, la FNSEA. Cela tombe admirablement bien, car Beulin est le patron d’une transnationale appelée Sofiproteol, qui pèse cinq milliards d’euros de chiffre d’affaires. Sofiproteol, c’est notamment l’industrie des nécrocarburants, que ses promoteurs appellent biocarburants. Et que soutient au travers d’Agrice l’agence publique, payée sur fonds publics, appelée Ademe. Vous voyez que cela se tient. Voici l’article de Charlie.

L’Ademe, ami lecteur, c’est très beau. D’ailleurs, c’est écolo. Créée en 1974 pour faire des économies d’énergie, au temps où ces salopards d’Arabes augmentaient les prix du pétrole, elle a pris plusieurs noms. En 1982, les socialos en ont fait l’Agence française pour la maîtrise de l’énergie (AFME). Elle est aujourd’hui , retiens ton souffle, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

Et voilà que ces corniauds de la Cour des Comptes ont décidé d’aller éplucher les dépenses et l’organisation interne. Cela donne un document très drôle, écrit pourtant dans une langue morte : « Communication à la commission du Sénat (article 58-2 de la LOLF) ». On en apprend de belles. L’Ademe ne connaît pas la crise. Au 31 décembre 2009, l’agence employait 1032 personnes, en augmentation de 8,5% par rapport à 2008 et de 12% par rapport à 2007. Avec en outre un « dépassement du plafond » des emplois temporaires, incluant la sous-traitance et l’intérim. Généreux, l’État n’applique pas à l’Ademe la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux.

Question budget d’intervention, tout baigne de la même manière. Il est passé de 340 millions d’euros à 670 millions d’euros entre 2008 et 2009. Sauf erreur de CM1, on n’est pas loin du double. Mais le plus extraordinaire est ailleurs : le grand Emprunt national lancé le 22 juin par Sarkozy prévoit de refiler 2,85 milliards d’euros à l’Ademe. On entre là dans la cour des grands. Pourquoi tant d’argent ? Pour remplir quatre missions magnifiquement vagues : « connaître, convaincre et mobiliser, conseiller, aider à réaliser ». Cela fait cher la conviction. Mais après tout, et si l’Ademe était à la hauteur ?

La Cour des comptes exprime à mots camouflés les doutes les plus sérieux sur la question. D’abord, l’agence est installée sur trois sites – Paris, Angers, Valbonne (Alpes-Maritimes) – très éloignés les uns des autres. Ce qui provoque cloisonnement et surcoûts. Mais pas question de déménager. Ensuite et surtout, le travail de l’Ademe ressemble à un vaste merdier. « Les listes de projets financés, note la Cour, montrent qu’à l’exception de quelques grands équipements (unités d’incinération d’ordures ménagères, réseaux de chaleur etc…), l’Ademe finance en région une multitude de petits projets portant sur un grand nombre de thématiques pour lesquelles les besoins sont virtuellement infinis (des HLM en haute qualité environnementale, des plans de déplacement d’entreprises, des achats de véhicules électriques, des analyses d’éclairage public etc.), sans que l’Ademe paraisse particulièrement proactive ».

Toute cette belle dépense « n’a de sens que si ces petites opérations créent des précédents et visent un effet de contagion. Pour que cet objectif soit atteint, il faudrait que l’Ademe soit capable de faire remonter ce qui est réellement innovant ». Mais, crotte de bique, ce n’est pas le cas. Et pour comble, l’Ademe n’a plus de conseil scientifique depuis septembre 2009, ce « qui est particulièrement pénalisant dans une période où les activités de recherche de l’établissement sont au cœur des nouveaux dispositifs Grenelle et Grand emprunt »

 Nous y voilà peut-être. Le Grenelle de l’Environnement. Cette grande farce montée en 2007 était destinée à faire de Sarkozy le roi planétaire de l’écologie. Pour la seule com’ autour de ce grandiose événement, l’Ademe a été autorisée à claquer 80 millions d’euros. Pas mal. L’Ademe, présidée jusqu’en 2008 par une proche de Sarlozy, Michèle Pappalardo, servirait-elle les mises en scène présidentielles ? Charlie verse au dossier un point indirectement évoqué par la Cour des Comptes, qui note sans insister : «  Au titre de l’action “démonstrateurs énergies renouvelables et chimie verte”, la convention Etat-Ademe publiée au Journal officiel le 8 août 2010 affecte 450 millions d’euros au  versement de subventions et 900 millions d’euros à des interventions sous forme de prêts, avances remboursables et prises de participation ».

 Ce qui se cache derrière ces beaux cadeaux s’appelle Agrice. Un invraisemblable lobby industriel abrité au cœur de l’Ademe, qui défend les intérêts des biocarburants (autrement appelés nécrocarburants). Ceux qu’on obtient en transformant des plantes alimentaires en carburant, dans un monde qui compte un milliard d’affamées chroniques. L’Ademe aide donc avec élégance Agrice, qui regroupe entre autres le chimiste Rhodia, Total, Limagrain, Bayer CropScience, l’Association Générale des Producteurs de Blé et autres céréales (AGPB), le CEA. On voit mieux où part l’argent. Le blé.

Ecrit par 

Fabrice Nicolino est un journaliste français né à Paris en 1955. Il a exercé plusieurs métiers, dont certains manuels – entre autres dans la chaudronnerie et la soudure –, avant de devenir secrétaire de rédaction à l'hebdomadaire Femme Actuelle en 1984. Il est ensuite devenu reporter, et depuis cette date, il a collaboré à de nombreux journaux, parmi lesquels Géo, Le Canard enchaîné, Télérama.

En 1988, il a participé au lancement de l'hebdomadaire Politis, qu'il a quitté en septembre 1990, avant de reprendre une collaboration régulière entre 1994 et 2003. Il écrit depuis 1994 dans le magazine Terre Sauvage ; il est chroniqueur au quotidien La Croix depuis 2003. Il est également le fondateur, avec Dominique Lang, des Cahiers de Saint-Lambert, revue dont le sous-titre est Ensemble face à la crise écologique. Il tient par ailleurs un blog depuis août 2007 : « Planète sans visa ».

Fabrice Nicolino écrit des articles sur le thème de l'écologie dans l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo depuis le mois de janvier 2010.



10/04/2011
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